L’alimentation équine est un domaine complexe qui requiert une approche éclairée. La nutrition équine moderne s’éloigne des pratiques traditionnelles pour adopter une approche individualisée, basée sur la science et la compréhension des exigences spécifiques de chaque cheval. Une alimentation inadaptée peut entrainer des problèmes de santé, dont les coliques.

Nous aborderons les nutriments essentiels, l’évaluation des exigences individuelles, le choix des aliments et les pratiques alimentaires optimales pour une santé durable.

Un paysage nutritionnel en évolution

Les pratiques alimentaires équines ont considérablement évolué au fil du temps. Des vastes prairies où les chevaux pouvaient paître librement et sélectionner les herbes les plus adaptées à leurs nécessités, nous sommes passés à des systèmes d’alimentation plus contrôlés, souvent basés sur des aliments industriels. Si ces aliments peuvent être pratiques, ils ne tiennent pas toujours compte de la diversité des exigences des chevaux et peuvent conduire à des problèmes de santé à long terme. L’alimentation « standard » ne convient plus, chaque cheval étant unique.

Pourquoi un guide moderne est-il nécessaire ?

Un guide moderne de nutrition équine est essentiel pour plusieurs raisons. Premièrement, il met l’accent sur l’importance d’une approche individualisée. Les exigences nutritionnelles d’un cheval de trait au repos sont très différentes de celles d’un cheval de sport participant à des compétitions de haut niveau. De même, les nécessités varient considérablement en fonction de l’âge, de la race et de l’état physiologique (gestation, lactation, convalescence).

  • L’activité du cheval influence grandement ses besoins énergétiques.
  • L’âge modifie la capacité à absorber certains nutriments.
  • La race peut prédisposer à certaines sensibilités alimentaires.

Deuxièmement, la science de la nutrition équine a fait des progrès considérables ces dernières années. Nous comprenons mieux le rôle des fibres dans la santé intestinale, l’importance du microbiome et l’impact des différents nutriments sur la performance et la santé du cheval. Ce guide intègre ces avancées scientifiques pour fournir des recommandations.

Objectifs de ce guide

Ce guide vise à fournir une compréhension claire et pratique des principes fondamentaux de la nutrition équine moderne. À la fin de cet article, vous serez en mesure de :

  • Identifier les nutriments essentiels pour la santé de votre cheval.
  • Évaluer les exigences nutritionnelles spécifiques de votre cheval en fonction de son activité, de son âge et de son état physiologique.
  • Choisir les aliments appropriés pour répondre aux nécessités de votre cheval.
  • Mettre en place des pratiques alimentaires optimales pour favoriser la santé et le bien-être de votre cheval.

Comprendre les fondamentaux: les nutriments essentiels

Une alimentation équilibrée repose sur la fourniture adéquate de nutriments essentiels. Ces nutriments, incluant l’eau, les glucides, les protéines, les lipides, les vitamines et les minéraux, jouent des rôles cruciaux dans la santé, la performance et la longévité du cheval. Sans une compréhension solide de ces nutriments, il est impossible de concevoir un plan alimentaire adapté. Explorons ces éléments fondamentaux de la ration alimentaire cheval.

L’eau: la pierre angulaire de la santé équine

L’eau est un nutriment essentiel souvent négligé. Elle représente environ 60 à 70 % du poids corporel du cheval et joue un rôle vital dans la digestion, l’absorption des nutriments, la thermorégulation et l’élimination des déchets. Un cheval adulte peut boire entre 20 et 70 litres d’eau par jour, en fonction de son activité et de la température ambiante. Une déshydratation, même légère, peut avoir des conséquences néfastes sur la performance et la santé du cheval.

  • Assurez-vous que votre cheval a accès à de l’eau propre et fraîche en permanence.
  • En hiver, proposez de l’eau tiède pour encourager la consommation.
  • Ajoutez des électrolytes à l’eau après un effort intense pour compenser les pertes dues à la transpiration.

Pour estimer les besoins hydriques de votre cheval, considérez les facteurs suivants :

Facteur Impact sur les besoins hydriques
Activité Augmente les besoins
Température Augmente les besoins par temps chaud
Alimentation Les aliments secs augmentent les besoins

Glucides (hydrates de carbone): source d’énergie et plus

Les glucides sont la principale source d’énergie pour le cheval. Ils se divisent en deux catégories principales : les glucides structuraux (fibres) et les glucides non structuraux (amidon et sucres). Les fibres sont essentielles pour la santé intestinale et la prévention des ulcères. Un apport suffisant en fibres permet de maintenir un transit intestinal régulier et de stimuler la production de salive, qui a un effet tampon sur l’acidité gastrique. Elles contribuent à une bonne santé digestive cheval.

Cependant, un excès d’amidon et de sucres peut avoir des conséquences néfastes, notamment la fourbure, l’obésité et certaines myopathies. Il est donc crucial de choisir des aliments riches en fibres et faibles en amidon et en sucres, en particulier pour les chevaux sensibles à ces composés.

Protéines: les briques de la vie

Les protéines sont essentielles à la construction et à la réparation des tissus, à la fonction immunitaire et à la production d’enzymes. Elles sont composées d’acides aminés, dont certains sont essentiels, c’est-à-dire que le cheval ne peut pas les synthétiser lui-même et doit les obtenir à partir de son alimentation. La qualité des protéines est donc un facteur important à prendre en compte pour établir la ration alimentaire cheval.

Les sources de protéines pour les chevaux peuvent être végétales (soja, luzerne, tournesol) ou animales (lait en poudre, lactosérum). Les protéines végétales sont généralement moins coûteuses et plus faciles à trouver, mais elles peuvent être moins digestibles que les protéines animales. Un manque de protéine peut entraîner une perte de masse musculaire et un affaiblissement du système immunitaire.

Lipides (matières grasses): énergie concentrée et bienfaits divers

Les lipides sont une source d’énergie concentrée, fournissant plus de deux fois plus d’énergie par gramme que les glucides ou les protéines. Ils sont également essentiels à l’absorption des vitamines liposolubles (A, D, E, K) et jouent un rôle important dans la santé de la peau et du pelage. L’ajout de matières grasses à l’alimentation peut également réduire la poussière et améliorer l’appétence des aliments. Ils sont donc particulièrement utiles pour l’alimentation cheval de sport.

Les sources de matières grasses pour les chevaux comprennent les huiles végétales (soja, tournesol, lin), les graines (lin, tournesol) et certains aliments concentrés. Les huiles végétales sont une source d’acides gras essentiels, notamment les oméga-3 et les oméga-6.

Vitamines et minéraux: les micronutriments indispensables

Les vitamines et les minéraux sont des micronutriments essentiels qui interviennent dans de nombreuses réactions métaboliques. Ils sont indispensables au bon fonctionnement de l’organisme et à la prévention des maladies. Voici quelques exemples :

  • Vitamine A: Essentielle pour la vision, la croissance et la reproduction. On la trouve dans l’herbe fraîche et le foin de bonne qualité. Une carence peut entraîner des problèmes de vision nocturne.
  • Vitamine D: Indispensable à l’absorption du calcium et du phosphore. Le cheval la synthétise grâce à l’exposition au soleil. Une carence peut provoquer des problèmes osseux.
  • Vitamine E: Un puissant antioxydant qui protège les cellules contre les dommages. On la trouve dans l’herbe fraîche et les huiles végétales. Une carence peut entraîner des troubles musculaires.
  • Calcium: Essentiel pour la santé des os, la contraction musculaire et la coagulation sanguine. On le trouve dans la luzerne et les aliments minéraux.
  • Sélénium: Un antioxydant qui travaille en synergie avec la vitamine E. On le trouve dans les aliments minéraux. Une carence peut provoquer des troubles musculaires et immunitaires.

Les carences et les excès de vitamines et de minéraux peuvent avoir des conséquences néfastes sur la santé du cheval.

Évaluation et adaptation: connaître son cheval et ses besoins

Une alimentation équilibrée est une alimentation adaptée aux exigences spécifiques de chaque cheval. Pour cela, il est essentiel d’évaluer l’état corporel du cheval, de prendre en compte les facteurs qui influencent ses exigences nutritionnelles et d’analyser la composition du fourrage. Cette évaluation permet de créer un plan alimentaire individualisé qui répond aux exigences physiologiques du cheval.

Évaluation de l’état corporel (body condition scoring)

L’évaluation de l’état corporel (Body Condition Scoring ou BCS) est une méthode simple et objective pour évaluer la quantité de graisse corporelle d’un cheval. L’échelle de Henneke, qui va de 1 (maigre) à 9 (obèse), est la plus couramment utilisée. Cette évaluation permet de détecter rapidement les problèmes de sous-alimentation ou de suralimentation et d’ajuster l’alimentation en conséquence. Les zones clés à évaluer incluent les côtes, la base de la queue, l’encolure et les épaules. C’est un élément clé de la gestion du poids du cheval.

Un BCS idéal se situe généralement entre 4 et 6, mais l’objectif spécifique peut varier en fonction de l’activité et de l’état physiologique du cheval. Un cheval de sport en compétition aura souvent un BCS légèrement inférieur à celui d’un cheval de loisir. De même, une jument en gestation aura besoin d’un BCS plus élevé pour assurer un développement optimal du poulain.

Facteurs influant sur les exigences nutritionnelles

De nombreux facteurs influencent les exigences nutritionnelles d’un cheval, notamment :

  • Activité: Les besoins énergétiques augmentent avec l’intensité de l’activité. Un cheval au travail léger (promenades) aura besoin de moins d’énergie qu’un cheval au travail intense (compétition de saut d’obstacles).
  • Âge: Les poulains en croissance ont des exigences plus élevés en protéines, en calcium et en phosphore. Les chevaux âgés peuvent avoir des difficultés à mâcher et à digérer les aliments, et peuvent bénéficier d’une alimentation plus facile à assimiler.
  • Race: Certaines races sont prédisposées à certaines pathologies liées à l’alimentation. Les poneys sont plus susceptibles de développer une surcharge pondérale et la fourbure, tandis que les pur-sang sont plus sensibles aux ulcères gastriques.
  • État Physiologique: Les juments en gestation et en lactation ont des exigences accrues en énergie, en protéines et en minéraux. Les chevaux en convalescence après une maladie ou une blessure peuvent également avoir des besoins spécifiques.
  • Conditions Environnementales: Le climat et la disponibilité du fourrage peuvent influencer les exigences nutritionnelles. Les chevaux vivant dans des régions froides ont besoin de plus d’énergie pour maintenir leur température corporelle, tandis que les chevaux ayant accès à une herbe de qualité peuvent avoir besoin de moins de concentrés.

Analyse du fourrage: la clé d’une alimentation équilibrée

Le fourrage est l’aliment de base du cheval et doit représenter la majeure partie de son alimentation. L’analyse du foin est essentielle pour connaître sa composition nutritionnelle et s’assurer qu’il répond aux besoins du cheval. Les paramètres importants à analyser comprennent la matière sèche, les protéines, les fibres (NDF et ADF), l’énergie (DE) et les minéraux (calcium et phosphore).

L’interprétation des résultats d’une analyse de foin permet d’ajuster l’alimentation en conséquence. Par exemple, si le foin est pauvre en protéines, il peut être nécessaire de complémenter avec un aliment concentré riche en protéines. De même, si le foin est riche en fibres, il peut être nécessaire de réduire la quantité de concentrés pour éviter une surcharge digestive. Elle est donc centrale dans la prévention de la fourbure.

Créer un plan alimentaire individualisé

En utilisant les informations collectées (BCS, facteurs influant, analyse du fourrage), il est possible de créer un plan alimentaire individualisé qui répond aux exigences spécifiques du cheval. Ce plan doit inclure le type de fourrage, la quantité de fourrage, le type de concentrés et la quantité de concentrés. Il peut également inclure des compléments alimentaires si nécessaire.

Il est important de surveiller régulièrement l’état corporel du cheval et d’ajuster l’alimentation en conséquence. Les exigences nutritionnelles peuvent varier au fil du temps, en fonction de l’activité, de l’âge et de l’état physiologique du cheval. Un plan alimentaire réussi est un plan qui est constamment adapté aux nécessités changeantes du cheval.

Les aliments toxiques et dangereux

Certains aliments, bien qu’appétissants pour le cheval, peuvent s’avérer toxiques et entraîner des problèmes de santé graves. Il est donc essentiel de connaître ces dangers potentiels et de les éviter à tout prix. Voici une liste non exhaustive d’aliments à proscrire :

  • Plantes toxiques: Le séneçon, la morelle noire, la digitale, le laurier-rose, le buis, l’if, le thuya, la belladone, la colchique d’automne et le cytise sont autant de plantes qui peuvent provoquer des empoisonnements chez le cheval. Il est donc crucial de vérifier la composition des pâturages et des zones où le cheval peut brouter.
  • Aliments moisis ou avariés: Le foin, les céréales et les autres aliments pour chevaux peuvent se détériorer rapidement s’ils sont mal stockés. La présence de moisissures peut entraîner des coliques, des troubles respiratoires et des problèmes neurologiques. Il est donc important de veiller à la qualité des aliments et de les conserver dans un endroit sec et ventilé.
  • Certains fruits et légumes: Les pommes de terre crues, les tomates vertes, les oignons et l’avocat contiennent des substances toxiques pour le cheval. Il est donc préférable de les éviter complètement.
  • Le chocolat: Contient de la théobromine, une substance toxique pour le cheval, même en petite quantité.
  • Le pain frais: Peut provoquer des coliques en raison de sa fermentation rapide dans l’estomac.

Pratiques alimentaires pour une santé digestive cheval optimale

L’alimentation ne se limite pas à la composition des aliments. La manière dont ils sont distribués joue un rôle tout aussi important pour la santé digestive et le bien-être du cheval. Voici quelques pratiques à adopter :

  • Fractionner les repas: L’estomac du cheval est relativement petit et fragile. Il est donc préférable de distribuer l’alimentation en plusieurs petits repas tout au long de la journée, plutôt qu’en un ou deux gros repas.
  • Privilégier le fourrage: Le fourrage doit représenter la majeure partie de l’alimentation du cheval. Il permet de maintenir un transit intestinal régulier et de stimuler la production de salive, qui a un effet tampon sur l’acidité gastrique.
  • Assurer un accès permanent à l’eau: L’eau est essentielle à la digestion et à l’hydratation du cheval. Il est donc important de s’assurer qu’il a accès à de l’eau propre et fraîche en permanence.
  • Effectuer les changements d’alimentation progressivement: Les changements brusques d’alimentation peuvent perturber la flore intestinale du cheval et provoquer des coliques. Il est donc important d’effectuer les changements progressivement, sur une période de plusieurs jours à plusieurs semaines.

Alimentation spécifique: cheval de sport et cheval âgé

Alimentation du cheval de sport

L’alimentation du cheval de sport doit répondre à des exigences spécifiques liées à l’intensité de son activité physique. L’objectif est de lui fournir l’énergie nécessaire pour soutenir l’effort, de favoriser la récupération musculaire et de prévenir les blessures. Voici quelques points clés :

  • Augmenter l’apport énergétique: Les chevaux de sport ont besoin de plus d’énergie que les chevaux de loisir. Cet apport énergétique peut être augmenté en ajoutant des matières grasses à l’alimentation, comme des huiles végétales ou des graines.
  • Fournir des protéines de qualité: Les protéines sont essentielles à la construction et à la réparation des muscles. Il est donc important de fournir des protéines de qualité, provenant de sources végétales ou animales.
  • Assurer un apport suffisant en électrolytes: Les chevaux de sport perdent beaucoup d’électrolytes par la transpiration. Il est donc important de compenser ces pertes en ajoutant des électrolytes à l’eau ou à l’alimentation.
  • Protéger les articulations: Les articulations des chevaux de sport sont soumises à des contraintes importantes. Il est donc important de les protéger en ajoutant des compléments alimentaires comme la glucosamine et la chondroïtine.

Alimentation du cheval âgé

Avec l’âge, les chevaux peuvent présenter des difficultés à mâcher et à digérer les aliments. Il est donc important d’adapter leur alimentation pour leur assurer un confort optimal et prévenir les problèmes de santé. Voici quelques recommandations :

  • Choisir des aliments faciles à mâcher: Les aliments doivent être faciles à mâcher et à avaler, comme les granulés, les mashs ou le foin haché.
  • Augmenter l’apport en fibres: Les fibres sont importantes pour la santé digestive du cheval âgé. Il est donc important de choisir des aliments riches en fibres, comme la pulpe de betterave ou le foin de prairie.
  • Fournir des protéines de qualité: Les protéines sont essentielles au maintien de la masse musculaire. Il est donc important de fournir des protéines de qualité, provenant de sources végétales ou animales.
  • Ajouter des compléments alimentaires: Les compléments alimentaires peuvent aider à soutenir la fonction articulaire, la fonction immunitaire et la digestion du cheval âgé.

Une nutrition équine éclairée

La nutrition équine moderne repose sur une approche individualisée, basée sur la science et la compréhension des exigences spécifiques de chaque cheval. En comprenant les nutriments essentiels, en évaluant les exigences individuelles, en choisissant les aliments appropriés et en mettant en place des pratiques alimentaires optimales, vous pouvez contribuer à la santé, au bien-être et à la performance de votre cheval. N’hésitez pas à consulter un nutritionniste équin pour obtenir des conseils personnalisés et adaptés à votre situation.

En vous informant continuellement et en adaptant vos pratiques, vous vous assurez de fournir à votre cheval l’alimentation la plus adaptée à ses besoins tout au long de sa vie. Une alimentation équilibrée est un investissement dans sa santé et sa longévité.